Nous comprenons le sentiment de peur qui peut se propager suite à la diffusion d’informations quant à l’identité potentielle des terroristes du vendredi 13 novembre 2015.
Cependant, cette peur, bien qu’elle soit légitime, ne peut primer sur la raison. Ne laissons pas la haine, la tristesse, l’amertume embuer nos pensées. Ne nous tournons pas vers l’extrême opposé, la dérive sécuritaire, l’islamophobie, la xénophobie.
Personne ne quitte son pays, sa famille, ses amis le cœur léger, à la va-vite. Les demandeurs d’asile ont subi des persécutions. Ils ont parfois été torturés, parfois été emprisonnés arbitrairement sans aucun accès à un système judiciaire comme nous avons la chance d’en avoir – ils ont souffert. Et ils ont peur. De qui ? De quoi ? De la même chose, des mêmes personnes, qui, vendredi soir, ont mis Paris à sang. De la même chose, des mêmes personnes que nous.
Les personnes qui demandent l’asile en France et en Europe en général, qui espèrent y devenir réfugiés, fuient des pays où ce que le peuple français a enduré vendredi est présent au quotidien, partout. Ils ne représentent pas un danger pour la France ; ils étaient dans une si grande détresse qu’ils ont risqué leurs vies pour que la France les sauve de ce même danger.
Au cours de la procédure de demande d’asile, devant l’Officier Français de Protection des Apatrides et des Réfugiés, puis devant les juges de la Cour Nationale du Droit d’Asile si nécessaire, les demandeurs d’asile doivent raconter leur histoire, dans les détails les plus douloureux. Ils doivent se replonger dans les jours les plus sombres de leurs vies, et raconter, encore et encore, les raisons qui les ont poussés à s’enfuir. Ils doivent donner des noms de personnes, de lieux, décrire, encore plus en détails, les paysages, les situations, les paroles, les coups, le moindre détail dont ils se souviennent, juste pour prouver que leur histoire est réellement la leur. L’OFPRA corrobore toutes ces informations avec celles qu’il recueille de divers rapports d’organismes du terrain, de l’UNHCR, de journalistes, etc.
Les demandeurs d’asile obtenant le statut de réfugié à l’issue de cette procédure ont été soumis à un contrôle extrêmement méticuleux.L’Etat français, au nom du peuple français, reconnait que ces individus sont dans un danger tel qu’ils requièrent une protection internationale. Ne tendons pas aux réfugiés une main pour la reprendre, ne leur arrachons pas cette bien triste «victoire».
Si nous fuyions des terroristes comme ceux qui ont froidement abattu des centaines de français vendredi soir, ne serions-nous pas aussi soulagés, qu’un autre pays nous accueille ? Soulagés à défaut d’être contents, puisqu’obtenir le statut de réfugié n’est pas une victoire – c’est la matérialisation de ce que les horreurs passées n’étaient pas qu’un cauchemar. C’est se dire « cela m’est vraiment arrivé, à moi, et l’Etat français le reconnait. Cela doit être très grave alors… Et il s’agit de moi. » C’est une victoire, certes, « sains et saufs, enfin ! ». Mais elle a un goût amer, elle n’est pas synonyme de bonheur.
Nous condamnons les événements du vendredi 13 novembre, comme tout le peuple français, et comme le peuple français, nous sommes en deuil. Cependant, nous condamnons aussi les amalgames. Ce sont eux qui sont la cause des actes haineux qui déchirent aujourd’hui notre monde. Ne répondons pas à la haine par la haine ; notre meilleure arme est et demeure la solidarité. Solidarité face à cet ennemi commun qui fait fuir des peuples entiers, qui vendredi nous a touchés au cœur.
Toutes nos portes étaient #PorteOuverte vendredi 13 novembre, quand Paris vivait de sombres heures. Cet élan de solidarité nous a profondément émus. Montrons qu’il ne s’arrête pas là où la peur commence. Gardons notre #PorteOuverte à ceux qui en ont encore tant besoin.
L’équipe de Cocotte & Marmite